La ville d’Amiens a lancé cet hiver une campagne de communication ciblant en zone piétonne les mauvais comportements des cyclistes et des conducteurs de trottinettes ; et un article du Courrier Picard en date du 5 mai relaie une récente opération de verbalisation réalisée à l’encontre des mêmes usagers.
Il ne nous semble pas anormal que des actions de ce type en faveur de la sécurité des piétons, alliant sensibilisation et répression, soient menées, en ciblant en priorité les vitesses excessives des usagers de la trottinette et du vélo ; des mises en dangers des piétons peuvent effectivement être constatées régulièrement en zone piétonne et il faut lutter contre ces comportements.
Ceci étant dit, en élargissant un peu la focale, nous souhaitons rappeler quelques chiffres et proposer une action globale et proportionnée en faveur de la sécurité des piétons en milieu urbain :
- Selon les chiffres du dernier bilan consolidé de l’observatoire national interministériel de la sécurité routière, on a dénombré en 2021, 300 morts de piétons en agglomération dans toute la France (dont 117 sur passage piéton). Moins de 2% de ces décès sont liés à une collision avec un cycliste ou un trottinettiste ; dit autrement ce sont les accidents avec les conducteurs d’engins motorisés, principalement voitures et camion, qui causent plus de 98% des décès de piétons en milieu urbain. Nous appelons donc à des campagnes globales en faveur de la sécurité routière des piétons qui cibleraient en priorité/plus massivement les comportements délictueux des conducteurs d’engins motorisés. Combien de PV dressés en 2021, 2022, à Amiens pour non-respect de priorité au passage piéton ? combien pour excès de vitesse en zone 30 ? Les actions menées doivent assurément s’intensifier et gagner en visibilité.
- Un meilleur partage de l’espace public en faveur des piétons, mais aussi des cyclistes, et au détriment de l’espace accordé à la voiture, doit être mené pour limiter les conflits d’usage entre ces deux catégories d’usagers. On peut citer notamment quelques contre-exemples en zone piétonne ou en hyper-centre ville que nous appelons à corriger au plus vite.
- Rue Gresset, le marquage au sol apposé incite les cyclistes à emprunter le trottoir partagé de cette entrée ouest de la zone piétonne, fortement fréquenté. A côté, deux voies de circulation sont dédiées aux modes motorisés : il faut reprendre une voie à consacrer à un duo de bandes cyclables (dans le sens de la circulation et en double-sens cycliste qui est ici autorisé) ou à une piste cyclable bidirectionnelle, voire réaliser a minima des marquages au sol pour inciter les cyclistes à emprunter, en sens courant ou en DSC, la chaussée plutôt que le trottoir.
- Une action doit être menée pour rendre ouvert au DSC (conjuguant aménagement de voirie et modification du plan de circulation) les deux axes parallèles les plus proches de la zone piétonne (« anneau vert »), pour inciter les cyclistes les plus pressés à emprunter en priorité ces deux itinéraires plutôt que l’axe piéton MACU -> gare.
- L’axe reliant la place Vogel à l’esplanade Branly, refait lors des travaux du BHNS, sans aménagement cyclable au mépris de la réglementation en vigueur, présente en revanche des trottoirs de bonne largeur et confortables. La circulation motorisée importante de cet axe, souvent de transit et avec des vitesses régulièrement excessives, conjuguée à l’absence de piste cyclable, rend cet itinéraire très dangereux pour les cyclistes, qui peuvent donc par ricochet se reporter de manière incommodante sur les trottoirs. Un travail sur le plan de circulation du centre-ville doit pouvoir exclure la majeure partie du trafic motorisé de transit de cet axe, le rendre ainsi cyclable, et libérer par conséquence les trottoirs des mésusages actuels liés au vélo ;
- Au-delà du centre-ville, la zone 30 km/h doit devenir la règle en dehors des grands axes, sur 80% du linéaire des voiries, en intérieur de faubourg et quartiers amiénois comme dans les bourgs et villages. Le risque de décès d’un piéton percuté par un véhicule entre un choc à 30 km/h et un choc à 50 km/h est multiplié par 10.
- Enfin, en zone piétonne, une action pourrait aussi être développée pour apaiser, en matinée particulièrement, le trafic des camions livrant la zone piétonne. Des vitesses excessives et des refus de priorité piétons peuvent régulièrement être constatés. Une limitation plus importante des tonnages des camions autorisés à circuler en centre-ville ainsi qu’un développement de la cyclo-logistique doivent être des pistes à explorer pour sécuriser davantage piétons comme cyclistes.
Au-delà de ces propositions en faveur de la sécurité des piétons en centre-ville, nous formulerons prochainement de nouvelles propositions plus globales en faveur de la sécurité des déplacements des usagers les plus vulnérables, piétons comme cyclistes.